tag:blogger.com,1999:blog-217329212024-03-07T03:54:01.141-05:00Mon journal de CompostelleMon journal raconte ce qui se passe dans ma tête pendant que je marche les 800 kilomètres du chemin de Compostelle. L’histoire d’un homme qui devient tranquillement, pas par pas, un pèlerin.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comBlogger34125tag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1138673075036106842006-03-07T17:02:00.000-05:002006-04-06T09:35:49.340-04:00Partir pour CompostelleLa première fois que m'est venue l’idée de faire le pèlerinage de Compostelle, j’avais 25 ans. Je venais de lire le roman de Paulo Coelho, le pèlerin de Compostelle.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20sentier.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20sentier.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />À 38 ans, treize ans plus tard, je rêve encore de vivre cette expérience. Une "grande" marche de plus de 800 kilomètres où je pourrais méditer sur ma vie, une occasion de rencontrer des gens de divers nationalités. Je réfléchis sur cette pensée de Confusius:" L'être humain perd sa santé à gagner de l'argent et par la suite, il perd son argent à se refaire une santé. Il pense au futur, au point d'oublier le présent, de sorte qu'il ne vit ni dans le présent, ni dans le futur. Finalement, il vit comme s'il n'allait jamais mourir et il meurt comme s'il n"avait jamais vécu "<br /><br />j'ai le goût de partir, mais j'hésite encore, j’ai des préoccupations réelles : je devrai laisser ma blonde s’occuper toute seule de nos deux jeunes enfants pendant 40 jours, je n'aurai pas de revenu pendant cette période, je vais probablement devoir refuser des contrats, ma carrière pourrait en être affectée. Il y a aussi le jugement des autres. Cela va surprendre beaucoup de monde : je n’ai pas le portrait type d’une personne qu'on pourrait appeler un pèlerin, je travaille dans le cinéma comme assistant à la caméra et je ne vais pas à la messe. Il va falloir le justifier auprès de la famille, des amis, des collègues de travail et répondre à cette question : " mais pourquoi un pèlerinage ? "<br /> <br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20chemin.jpg"><img style="float:right; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20chemin.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Je suis plutôt discret sur ma personne lorsqu’on aborde le thème de la spiritualité. Je n’aime pas en parler à moins que quelqu’un m’aborde sur le sujet. Je pense que c’est un sujet personnel où chacun développe sa façon de concevoir la vie. Si je raconte mon pèlerinage ce n’est pas pour convaincre qui que ce soit de quoi ce soit. C’est tout simplement pour partager avec les gens que ça intéresse, l’expérience d’un homme ordinaire qui a fait une démarche spirituelle.<br /><br />Après avoir raisonné toutes mes peurs, je décide de prendre un temps d'arrêt pour me permettre de faire le pèlerinage de Compostelle en mars 2004. <br /><br />Pour débuter, je vais à un séminaire à Sherbrooke ou des anciens pèlerins nous donnent toute l’information sur l’équipement, le transport et l’entraînement. Tout ce qu’il faut savoir pour ne pas avoir de problème.<br /><br /> Je commence mon entraînement, je marche 6 km par jour, puis j’augmente graduellement la distance à 9 km. Avec mon sac à dos chargé d’une vingtaine de livres, je marche pratiquement tous les jours du mois de novembre au mois de mars. <br /><br />J’achète graduellement mon équipement ; des souliers de marche, un sac à dos, du linge en polyester, des bas anti-ampoules et un billet d’avion. <br /><br /> Je lis la biographie de Gandhi, Martin Luther King et celle de Nelson Mandela. Je découvre des liens entre ces hommes, soit l'essentiel du message du Nouveau Testament.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1138736061356174812006-02-17T14:29:00.000-05:002006-03-15T20:30:27.026-05:00Le 22 mars 2004 – Le départ Montreal- St-Jean Pied de Port.<a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/moi.0.jpg"><img style="float:right; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/320/moi.jpg" border="0" alt=compostelle"" /></a><br />Après quatre mois d’entraînement, le jour du départ est finalement arrivé. Suzie vient me conduire à l’aéroport trois heures avant mon départ. Nous passons ces dernières heures ensemble dans ce village fantôme qu’est devenu l’aéroport de Mirabel. Nous nous amusons à se faire prendre en photo par une distributrice et nous allons souper à la cafétéria.<br /><br />C’est l’heure de l’embarquement. Elle m’accompagne jusqu’au contrôle des bagages. Je me sens un peu nerveux, je sais que je pars pour six semaines et que cela ne sera pas toujours facile. Suzie, toujours égale à elle-même, est calme et de bonne humeur. Il n’y aura pas d’au revoir pénible, juste un baiser et un câlin. On se revoit plus tard, je vais t’écrire se dit-on. Je la regarde se diriger vers la sortie. Je me dis que j’ai vraiment eu de la chance de rencontrer cette femme dans ma vie. <br /><br />L’avion attérrit à Paris à l’heure et c’est tant mieux, car je dois prendre le train jusqu’à Bayonne. Afin de m’acheter un billet de train, je me rends à la gare qui est annexée à l’aéroport. J’apprends qu’il n’y a pas de départ pour Bordeaux aujourd’hui. Il faut donc que j’aille à la gare de Monparnasse qui se trouve à Paris. Il est 11h10 et le train part à 12h15 précise.<br /><br />Éric la panique, je cours comme un malade : je prends le métro, je fais un transfert, je me perds et j’arrive à la gare de Montparnasse à midi, un bon vingt minutes à l’avance.<br /><br />Il est 18 heures , lorsque j’arrive à la gare de Bayonne. Cette fois, je prends un petit train d’un seul wagon dont je suis le seul passager. Je suis très fatigué, je n’ai pas dormi depuis plus de 24 heures, mais le changement drastique de culture me mets sur le « HI ». <br /><br />J’aperçois les pics blancs des Pyrénées. Ce n’est pas de bon augure, l’année dernière; il y a deux pèlerins qui sont morts de froid dans les montagnes. Ils ont marché pendant une importante chute de neige. Ils se sont perdus et sont morts de froid. Il faudra peut-être que je passe par la route.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20maison.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20maison.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />La locomotive arrive à St-Jean Pied de Port, une jolie femme est là pour m’accueillir :<br /><br />-Good evening ! <br /><br />Elle a un drôle d’accent, je devine qu’elle vient de l’Australie. Elle regarde tout autour comme si elle cherchait quelqu’un.<br /><br />- Are you Alone ?<br /><br />— Oui, eh… yes.<br /> <br />Elle prend un air triste. Je trouve que c’est une bien drôle de façon d’accueillir des gens ! Mais, je ne m’entendais pas à voir personne. Alors, je suis bien content d’avoir un guide. Sur la route de l’auberge, elle m’explique qu’elle attend son copain depuis deux jours, iI devait arriver hier d’Australie. Elle me donne de l’information sur le sentier, la météo, les restaurants. Je lui dis que je suis honoré de l’avoir comme guide et qu’elle fait un excellent travail. <br /><br />Qui aurait pu prévoir que je sois accueilli par une Australienne à St-Jean-Pied de Port ?<br /><br />J’entre dans l’auberge, c’est une vieille maison en pierre de plusieurs centaines d’années. L’aubergiste, un homme d’une cinquantaine d’années, est très chaleureux avec moi. Je lui donne mon credential. Il remarque que je suis Canadien :<br /><br />— Est-ce que c’est vrai qu’il a fait –50 *C à Montréal cet hiver ?<br /><br />— Oui ! c’a duré une semaine, ç’a été terrible, les autos ne démarraient plus. <br /><br />Je sais que j’exagère, mais c’est plus fort que moi ! Je trouve que les Québécois ont toujours tendance à exagérer les rigueurs de l’hiver canadien. Peut – être avons-nous envie d’exprimer notre frustration à la place de nos ancêtres. Qu’auraient dit les colons à leur famille, s’ils avaient pu leur téléphoner ? Probablement quelque chose comme : ¨ il fait fret en criss, mais on est courageux, on va s'en sortir¨. Ils ont tant souffert du froid. C’est grâce à eux si nous pouvons vivre au Québec maintenant. C’est pourquoi, je ne manquerai jamais une occasion d’exagérer sur la température, pour que les Français sachent qu’on vient d’une bande de ¨tough¨<br /> <br />Lorsque j’entre dans la chambre du gîte, il y a des personnes de France, d’Allemagne, d’Australie ils ont entre 16 et 65 ans. Nous avons tous de la lumière dans les yeux.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1138813283970929022006-01-28T11:59:00.000-05:002006-03-29T20:33:50.006-05:00Le 24 mars 2004 La marche de la neigePremière journée de marche. 28km jusqu’à Roncevaux<br /><br />Je me lève tôt. Il est 6 heures. J’essaie de placer mes affaires dans mon sac à dos sans faire de bruit. Ce n’est pas facile, il fait noir et il ne faut rien oublier. L’Australienne vient me saluer et elle me souhaite bonne chance. C’est la dernière fois que je lui parle. Il y aura comme ça beaucoup de gens qu’on ne voit qu’une fois et qu’on ne reverra plus jamais par la suite.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20hiver.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20hiver.jpg" border="0" alt="" /></a><br />L’aubergiste, pour des raisons de sécurité, m’interdit de prendre le sentier de la montagne. Il y a trop de neige, je risque de me perdre. Je dois donc passer par la route.<br /><br />Un bénévole de l’auberge, un type de 60 ans, veut faire avec moi le premier kilomètre. Il s’assure ainsi que je prenne bien le bon chemin, celui qui passe par la route. Il marche à toute vitesse en me parlant de la signalisation des sentiers du Camino.<br /><br />-Tu dois suivre les flèches jaunes. Elles sont omniprésentes sur le chemin. Elles peuvent se trouver n'importe où ; sur un arbre, sur une pierre, peinturées sur la route. C’est ton principale guide. Tu dois toujours garder un œil dessus.<br /><br />J’ai beaucoup de misère à le suivre ! Au bout de quelques kilomètres, il me laisse seul et me dit au revoir ! J’ai chaud, je m’arrête et j’en profite pour enlever un gilet !<br /><br />Il y a quelque chose de spécial dans ces sentiers. Je m’y sens bien tout de suite. Je suis disponible à tout ce qui m’entoure et j’ai l’impression d’être proche de la nature. <br /><br />Je remarque un oiseau qui chante dans un arbre, c’est une mésange. Elle me rappelle ma tante May , une religieuse qui adorait peindre et observer les oiseaux. Lors de notre visite du temps des fêtes,elle avait donné à Félix, mon petit garçon, une mésange en plastique qui se met à chanter lorsqu’on l’agite. On ne la savait pas, mais cette visite a été la dernière que nous lui avons faite. Elle est morte peu de temps après. <br /><br /> Je comprends en observant la mésange chantée pourquoi elle aimait tant les oiseaux. <br /><br />Les chiens en France sont voraces. Ils n’aiment pas les étrangers. Tous les chiens que je rencontre sur mon chemin veulent me bouffer. Ils me mettent en garde de ne pas rester trop longtemps sur leur territoire. Je marche plus vite, mais je ne cours pas. J’essaie de ne pas leur tourner le dos, la plupart du temps, ça suffit pour eux. Tu quittes mon territoire, il n’y a pas de problème.<br /><br />Mais il y a toujours des exceptions, par exemple, ces deux petits chiens, qui n’ont pas suscité assez de méfiance de ma part. Lorsqu’ils m’ont vu, ils ont chargé à fond de train vers moi, puis l’un d’eux s’est approché de ma cheville et a déposé ses crocs contre mon talon. Je sentais ses dents exercer une pression. J’étais sûr qu’il allait me mordre ! Et puis je ne sais pourquoi, il a ouvert sa gueule et il s’est enfui avec l’autre chien vers sa demeure. S’il m’avait mordu, c’en était fait de mon voyage.<br /><br />J’attaque la montée par un sentier qui quitte la route. Au début, il y a un peu de neige, Il est facile de marcher dans cette neige fine. Je me dis que les Européens en font toute une histoire, la neige y a rien là ! Cependant, après quelques heures de montée, je découvre que l’épaisseur de la neige est proportionnelle à l’altitude où tu te trouves. Autrement dit, plus tu montes, plus il y a de la neige…<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20neige.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20neige.jpg" border="0" alt=compostelle"" /></a><br />Je monte jusqu’à ce que je me retrouve à marcher dans au moins deux pieds de neige, je ne peux faire plus de sept pas sans m’arrêter, mon cœur pompe au maximum et je dois lui donner le temps de récupérer. Je tiens ce rythme pendant deux heures : je marche sept pas, j’arrête pour prendre mon souffle puis je repars pour un autre sept pas. Je n’ai pas le choix, il est trop tard pour retourner sur mes pas. Je compte sur mon intuition qui me dit que le sommet n’est pas loin. À la fin, j’entends des voitures passées, je sais que la route est tout près. Puis je vois des pèlerins qui marchent sur le chemin. Eurêka, je suis sauvé !!!<br />.<br />J’y suis arrivé avec de la patience. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas patient, alors, j’ai appris ce qu’on pouvait faire avec celle-ci ! <br /><br />Après une longue descente, j’arrive à Roncevaux, j’entre dans une brasserie. Je suis complètement exténué. Je m’assois au bar, je cale une bière comme si c’était un verre d’eau, puis une autre, sans parler, sans rien dire. À ma gauche, il y a un Allemand qui me regarde en souriant , il attend que j’aie fini la deuxième puis il dit en anglais :<br /><br />-Tough day hein ?<br /><br />Nous discutons, je lui raconte mon histoire. J'apprends qu'il est parti de Berlin et se dirige vers Compostelle, une marche qui totalisera 2500 km lorsqu’il arrivera !<br /><br />Plus tard, je vais à la messe où 5 prêtres ont dit la messe pour 6 personnes. Ils nous ont souhaité bon courage et bonne route ! Il y a des Français, un Suisse, un Espagnol et deux Allemandes.<br /><br />Je couche dans un monastère, qui a un plafond de 50 pieds de hauteur et pas de fenêtre. Le tenancier s’appelle Pablo, il parle français, espagnol et hollandais. Je trouve étrange qu’il parle le hollandais et pas l’anglais, Je lui demande :<br /><br /> ¨Pourquoi hollandais ?¨ <br /><br />— Parce que ma femme est hollandaise ! me répond-il !<br /><br />— Ah, OK, c’est une bonne raison…morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1138906975739602042006-01-27T13:56:00.000-05:002006-04-04T08:16:55.603-04:00Le 25 mars 2004. Notre corps est une merveilleuse machineRonceveaux-Lassaroma<br />28 kilomètres<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/25%3A03maison%20pe%3F%3Flerin.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/25%3A03maison%20pe%3F%3Flerin.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Ce matin, je dois payer le tribut de mes excès de la veille. Ce sentier qui avait deux pieds de neige de profondeur a laissé sa marque. Les muscles supérieurs de ma jambe droite ont manqué d’oxygène. Je ne peux lever ma jambe droite plus de 5 cm sans ressentir de la douleur. Je peux tolérer 10 cm. Si j’ai besoin de lever ma jambe plus haut, je dois utiliser mes deux mains... <br /><br />Le corps humain est une merveilleuse machine. Si l’un de nos muscles flanche, tous les autres muscles le remplacent pour compenser ceux qui ne peuvent plus fournir le même effort. C’est ainsi que ma jambe gauche et mon mollet droit m'ont transporté pendant les vingt premiers kilomètres. Ils m'ont permis de ménager les muscles douloureux de ma jambe droite.<br /><br /> Après six heures de marche, mon mollet droit est fatigué. C’est alors que mes muscles douloureux de la jambe droite, qui ont eu le temps de récupérer, ont pris le relais. Ils ont supporté davantage mon poids durant les huit derniers kilomètres, donnant ainsi à mon courageux mollet droit un repos bien mérité !<br /><br />Et tout cela se fait sans même que vous y pensiez.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20fleche%20jaune.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20fleche%20jaune.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />À Zubiri, je m’arrête pour chercher de l’eau dans le village. Au bout d’une ruelle, il y a une camionnette hors de laquelle coule du sang. Je me dis que c’est probablement un boucher qui vient de faire une livraison. Comme il y a plusieurs flaques d’eau par terre et que la camionnette vient d’être nettoyée, je cherche le boyau d’arrosage, je le trouve près de la maison. Le propriétaire est assis sur sa terrasse, il caresse un renard empaillé. Je lui demande de l’eau, il me fait signe de me servir.<br /><br />Je trouve cette situation étrange. Une camionnette est tachée de sang et un homme caresse un renard empaillé... Il n’y a pratiquement pas d’animaux dans la forêt où je marche. Des oiseaux et des écureuils, c’est tout ce que j’ai vu ! Alors, voir un type qui caresse un renard empaillé, ça fait bizarre. Je remplis ma gourde. Je le remercie. Et je retourne dans la forêt. <br /><br />Je suis arrivé à Larrasoma vers 4h30 de l’après-midi. L’aubergiste a l’habitude, comme beaucoup d’Espagnol, de vous parler comme si vous compreniez tout ce qu’il disait. Vous avez beau lui dire que vous ne comprenez rien, il continue à parler, et cela, même sur le ton de la confidence. <br />: « Pas grave, un jour, vous comprendrez ! » Ont-ils l’air de vous dire.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1138983655994412142006-01-26T11:14:00.000-05:002006-04-04T08:26:23.656-04:00Le 26 mars 2004. Un homme libreLarrasoma-Pampelume<br />20 Kilomètres<br /><br />Lorsque je marche, je suis un homme libre. Il m’arrive parfois de ressentir des choses extraordinaires qui sont difficiles à raconter. C’est comme si tout à coup, le temps s’arrêtait pendant quelques secondes pour me permettre de comprendre à quel point la vie est plus grande que je suis capable de l’imaginer. C’est comme s’il y avait deux mondes : l’un, qu’on peut toucher, comprendre, analyser et qui meurt; et un autre, qui est immatériel, que toute notre intelligence ne peut saisir et qui est un cadeau qui nous anime . Ces deux mondes vivent ensemble, côte à côte. Pour moi, en ce moment, ils sont aussi réels l’un que l’autre.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/26%3A03%20sentier.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/26%3A03%20sentier.jpg" border="0" alt="" /></a><br />À l’heure du dîner, je vais dans une boulangerie pour acheter du pain et du jambon. Une femme souriante et enjouée d’une cinquantaine d’années me sert. Elle coupe le jambon en tranches et sépare la baguette de pain en deux pour me permettre de me faire un sandwich. Lorsqu’elle emballe la commande, je ne sais pourquoi, je remarque que ses yeux viennent pleins d’eau. Elle est émue, je la sens émue, Je n’ose pas lui demander si ça va, de toute façon, je ne le peux pas, je ne parle pas espagnol. Je suis étonné, j’essaie de comprendre ce qui se passe. Peut-être que je lui rappelle son fils ? Je ne sais pas, mais cela m’a marqué. <br /><br />À Pampelune, je visite la cathédrale et je téléphone à Suzie. L’auberge de Pampelune étant fermée, je continue la route jusqu’à Cizor Menor, qui est située à quelques kilomètres plus loin.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/26%3A03%20pamplume.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/26%3A03%20pamplume.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Jusqu’à maintenant, j’ai toujours bien dormi. Les ronfleurs ne me dérangent pas, mais cette nuit, j’ai affaire au roi des ronfleurs. Il ronfle si fort que personne ne peut dormir dans l’auberge. C’est absolument impossible de ne pas l’entendre quoique je porte mes deux bouchons dans les oreilles et que j’aie mis ma tête sous l’oreiller.<br /><br />Finalement, après quelques heures, le roi arrête de ronfler. Les autres ronfleurs, du type minou qui ronronnent, s’endorment et commencent à ronfler à leur tour. Une heure passe, puis le roi recommence à ronfler et les minous se réveillent. La routine s’installe : le roi ronfle, les minous restent éveillés. Le roi arrête de ronfler, les minous s’endorment et ronflent à leur tour. Ce sera comme ça toute la nuit. <br /><br />Évidemment, ceux qui ne ronflent pas ne dorment pas.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139250579016420072006-01-25T13:09:00.000-05:002006-03-15T20:14:13.056-05:00Le 27 mars 2004 Pampelume-Puerta de la ReinaLe réveil est pénible, le roi continue toujours son concert pendant que je déjeune avec les autres pèlerins. On trouve ça drôle, il n'est pas possible ce mec !<br /><br />Aujourd’hui, le chemin est fait surtout de collines. Je commence ma journée de marche par une montée qui dure près de deux heures. Pour la première fois, il n’y a plus d’arbre et le vent souffle avec beaucoup de force, ce qui rend la marche plus difficile. Je regarde derrière moi, je prends le temps d’admirer les Pyrénées. Cela m’a pris 3 jours de marche pour traverser cette chaîne de montagnes qui s’étend sur 80 kilomètres de large. En auto, ça m’aurait pris une heure pour couvrir la même distance, je réalise comment, à force d’utiliser des machines, on perd la faculté de prendre le temps de vivre. La marche, comme moyen de transport, nous amène à prendre conscience des effets qu'ont les machines sur notre mode de vie. Le rythme de ma vie est transformé ; je n'ai ni auto, ni cellulaire, ni baladeur ; il n'y a que moi, le paysage et le sentier.<br /> Du haut de cette colline, je peux admirer les 50 derniers kilomètres que j’ai parcourus, cela me laisse toujours une drôle d’impression.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20colline.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20colline.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />Il y a des éoliennes installées le long du chemin, leurs gigantesques hélices font de l’ombre sur mes pieds. Elles frappent l’air en jouant une musique lugubre qui me donne le sentiment d’entrer dans un monde irréel.<br /><br />Au sommet, il y a onze sculptures de pèlerins en fonte, ce sont des pèlerins qui marchent en groupe. Le vent est à sa plus grande intensité, il est difficile de rester en place. Je commence à avoir froid, je dois partir. Je salue pour la dernière fois les Pyrénées et j’entreprends la descente par l’autre versant.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20sculpture.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20sculpture.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />Je monte et je descends comme ça pendant des heures. Je traverse un long champ et j’arrive à une chapelle hexagonale, vielle de mille ans, construite par les chevaliers de l’Orde des Templiers. Je me suis assis à l’intérieur pendant dix minutes sans parler, même pas à moi. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20templier.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20templier.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />L’ordre des templiers était un regroupement de chevaliers qui protégeait les pèlerins contre les brigands. Il y a aussi de nombreuses légendes à leur sujet : par exemple, certains disent que c’est une société secrète qui aurait détenu la fameuse coupe que le Christ a utilisée lors du repas de la Cène. Ils avaient de nombreux rites très particuliers que l’Église catholique n’aimait pas. Un pape décida d’envoyer son armée les exterminer un certain vendredi 13 en 1453.<br /><br />L’auberge de Puerta la Reina est super confortable : il y a un foyer, une belle cuisine, de l’eau chaude et même deux machines internet qui fonctionnent comme une sécheuse, pour acheter du temps, on doit y mettre des pièces d'euro, un euro pour dix minutes.<br /> <br />J’écris donc une longue lettre de quelques pages quand un « bog » de l’ordinateur gèle l’écran. Comme je ne veux pas que tout le monde lise ma lettre, j’essaie d’éteindre l’ordinateur, mais je n’y arrive pas. Je décide de le débrancher. Malheureusement, je ne débranche pas la prise de l’ordinateur, mais la rallonge sur laquelle sont connectés les deux ordinateurs de la pièce. Malgré tous mes efforts, je n'ai pas été capable de les remettre en marche. Pris de remords, je décide d’aller voir l’aubergiste pour lui dire que les deux ordinateurs sont tombés en panne en même temps et que, c’est de ma faute. Comme je ne parle pas espagnol, elle ne comprend pas. Elle me dit qu’elle ne connaît absolument rien aux ordinateurs et qu’elle ne peut pas me rembourser. Je lui réponds : « oui, mais je ne veux pas être remboursé, je veux juste vous dire que... » rien à faire, elle est partie.<br /><br />J’ai rencontré plusieurs pèlerins depuis le début du pèlerinage. Nous nous suivons en faisant les mêmes étapes. Il y a Janine et Jean, les Pyrénéens. Un couple de Français adepte de la marche rapide qui est hautement compétitif. Il attribue beaucoup d’importance au côté physique de la marche.<br /><br />Il est étrange, mais courant qu’une sorte de compétition s’installe entre les pèlerins performants. ceux qui marchent vite aiment bien arriver parmi les premiers. Parfois, c’est très agaçant, parce que ça coupe la communication. Avec le temps, j’en suis venu à préférer la compagnie des pèlerins qui n’en avaient rien à foutre de marché vite pour arriver les premiers.<br /><br /> Jean le Pyrénéen me parle de son fils qui est resté à Montréal, qu’il trouve le Québec formidable et qu’il aimerait bien un jour aller le visiter. Alors, Éric le bon gars, lui donne son adresse. Je n’avais pas fini de prononcer le mot adresse que déjà, il était rendu avec sa famille chez moi au Québec ! Plus tard, c’est avec une indifférence totale qu’il s’adressait à moi, mais il n’hésitait pas à me parler de son futur voyage au Québec... Je me suis senti manipulé ! Éric le bon ou Éric le bonasse ? <br /><br />Il y a Tom qui est un jeune Australien qui n’a pas d’emploi. Il porte sur lui un sac à dos qui date de la seconde Guerre mondiale et qui doit peser 8 kilos de plus que le mien. Il est grand et costaud. Il a commencé son périple à Roncevaux. Il marche vite et il est toujours l’un des premiers à arriver au gîte. Il va par la suite payer cher son manque d’entraînement parce qu’il a eu une tendinite qui l’a considérablement ralenti, après Los Arcos, j’allais plus le revoir.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139324788999648012006-01-24T09:50:00.000-05:002006-03-15T18:57:33.273-05:00Le 28 mars 2004 Estella le petit poisCe matin, il neige. Je marche comme un moine dans le silence, d’un pas tranquille sûr et doux. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20sentier.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20sentier.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Une phrase me traverse l’esprit : " l’homme qui savoure toutes les nuances d’un petit pois n’est-il pas plus heureux que celui qui se plaint que son filet mignon n’est pas cuit à point ? "<br /><br />Cet après-midi, il pleut, une journée froide, difficile, mais je suis heureux, toujours heureux, peu importe la température. Après cette longue marche sous la pluie et la neige, je savoure toutes les nuances de mon verre de vin. C’est le meilleur que je n’ai jamais pris, un vin maison de 1 $.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20estella.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20estella.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Les pèlerins.<br /><br />Il y a Diana, la Londonienne qui est née à Londres pour de vrai et qui vit à Londres en ce moment. C’est une chanteuse d’opéra de trente-cinq ans qui est drôle et sympathique. Je suis allé prendre une bière avec elle à Estella. Le soir, elle nous faisait du bon thé. Elle nous a donné les notions de base du : « comment faire un bon thé », j’ai malheureusement oublié les parties les plus importantes, je me souviens juste qu’il ne faut pas que l’eau bout !<br /><br />Il y a Jonathan et son père, Jonathan marche avec son père depuis le début. Le trajet est difficile parce qu’il a beaucoup plu. Son père est fatigué et réussit à suivre la cadence difficilement, il a beaucoup d’ampoules. J’ai remarqué que quand je parle à Jonathan, il est souvent mal à l’aise. J’ai l’impression qu’il pense qu’on le voit comme un fils à papa (évidemment, il n’a rien d’un fils à papa). Cette impression est partagée par Diana la Londonienne. Après notre bière prise a Estella, nous rentrons à l’auberge et nous le croisons par hasard. Il nous dit que la journée a été particulièrement difficile pour son père et semble un peu découragé. Je le réconforte en lui disant que j’ai beaucoup d’admiration pour ce qu’il fait. Je lui dis que malgré les difficultés, il a beaucoup de chance de pouvoir marcher avec son père. Diana lui dit qu’elle aurait adoré pouvoir le faire avec son père, mais que ce n’était plus possible. Sur ce, il est ému et Diana le prend dans ces bras en lui donnant une tape dans le dos et ils s’en vont souper. C’était la dernière fois que je vis Jonathan, son père et Diana qui ont tous décidé de faire des étapes plus courtes.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139499634042492862006-01-23T10:26:00.000-05:002006-03-21T08:28:07.686-05:00Le 29 mars 2004, la fontaine musulmane.Estella-Los Arcos <br />20 kilomètres<br /><br />Dans la ville d'Estella, il y a un monastère où se trouve une fontaine de vin. Elle a été construite par des moines qui donnent gratuitement du vin de leur cru aux pèlerins.Il suffit de se servir un verre à partir d'un robinet encastré dans la pierre. J'aurais pu profiter de cette aubaine, mais malheureusement, je suis passé par un autre chemin. Peut-être que ce n’était pas pour moi, après tout, j’ai pris suffisament de vin dans ma vie !<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20fontaine.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20fontaine.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /> Après quelques kilomètres de marche, je m'arrête près d'une fontaine, une autre, celle-là érigée par des musulmans où Pépé l'Espagnol et Cyros le Suisse se reposent. Cyros est un homme d'une grande culture qui parle couramment l’espagnol tandis que Pépé est un homme simple qui ne parle ni anglais ni français. C’est sans aucun doute les pèlerins les plus rapides, ils partent les premiers le matin, marchent à 5km/heure parfois 6 et arrivent à l’auberge longtemps avant les autres. J’ai remarqué que les Suisses sont en général de rapides marcheurs, mais non les Espagnols. C’est pourquoi, pendant presque tout le voyage, Pépé avait de la difficulté à suivre Cyros. Malgré leurs différences, ils ont fait tout le chemin ensemble.<br /><br />Cyros connait l’histoire de l’Espagne comme le fond de sa poche. Ce matin-là, j’ai eu une cours d’histoire sur l’éternelle guerre que se livrent chrétiens et musulmans sur une forme ou sur une autre depuis toujours. Il est intéressant de constater qu’au nom de la connaissance de la vérité bien des gens sont prêts à s’exterminer. Mais je pense qu’il est encore plus intéressant de constater que Dieu a donné à l’homme la liberté de croire ou de ne pas croire à ce qu’il voulait. Alors si Dieu, nous laisse la liberté de choisir, comment se fait-il que l’homme en vient-il à tuer pour obliger ses semblables à croire à sa religion ? <br /><br />Personnellement, je me suis toujours méfié du pouvoir sur toutes ses formes. Le pouvoir exercé par les hommes est souvent un moyen de contrôler les autres.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139596256969774252006-01-22T13:12:00.000-05:002006-04-04T08:35:01.640-04:00Le 30 mars 2004 La marche de la boueLos Arcos-Logrono 28 kilomètres<br />Il a beaucoup plu aujourd’hui, la pluie ne me dérange pas, je m’en "fous". Ce qui est dur, c’est la boue sur le chemin, cela prend une quantité incroyable d’énergie pour avancer, mes pieds s’enfoncent dans la route comme si je marchais sur du sable mouvant.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20la%20boue.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20la%20boue.jpg" border="0" alt="" /></a><br />J’ai marché 28 km dont au moins 18 km dans la boue, c’est un exploit physique. Tous les autres pèlerins ont coupé par la route. Je suis fou, mais c’est moi. J’ai connu la neige des Pyrénées alors « Whatever ! » <br /><br />Arrivé à Logrono, je ressemble à ces filles qui font des combats dans la boue. J’ai marché 7 heures avec les pieds complètement mouillés et je n’ai pas eu d’ampoule. Nous attendons que l’auberge de Logrono ouvre ses portes quand Christian arrive en boitant. Il se plaint que le chemin est impraticable, Il parle avec admiration de quelqu’un qui l’a marché au complet, Il a suivi ses traces presque jusqu’à la fin. Il décrit ces pas, des petits pas rapides et constants. Il est impressionné par l’exploit de ce pèlerin:" qui a marché tout ça ?" demande-t-il. Je lève la main et je répond : « Ces pas étaient les miens ».<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20logrono.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20logrono.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Christian est un athlète de 52 ans, à qui je donne 40 ans au maximum. Il marche 40 à 50 km par jour. Il va être ralenti par une blessure (étirement musculaire) qu’il s’est faite sur le chemin de la boue. Par la suite, Christian traina cette blessure pour le reste du voyage , malgré cela, il continua courageusement son pèlerinage.<br /><br />Dans le gîte, il y a avec moi des gens ¨cool¨ dont une dame de 75 ans qui fait la camino à bicyclette pour la 7è fois.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139758076431640172006-01-20T10:11:00.000-05:002006-03-15T20:16:15.573-05:00Le 31 mars Logrono-Najera La prière<a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/eglise.0.jpg"><img style="float:right; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/eglise.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a>Il arrive parfois que j’ai l’esprit ailleurs et que je manque une flèche. Alors, je dois retrouver mon chemin, parfois cela veut dire revenir sur mes pas. Cette fois, je retrouve le chemin grâce à une photographie que je prends de cette église. Je suis à la recherche de mon cadre quand la flèche jaune qui indique le chemin de Compostelle m’apparaît : elle est sur l'église, dans le coin gauche. Comme l'église est ouverte et que je suis fatigué, je décide d’aller m’y reposer, j'entre et je m'assoie. Il n’y a pas assez d‘espace sur le banc pour moi et mon sac à dos (que je n’ai pas enlevé), je dois donc m’agenouiller. Je prends conscience de ma situation: je suis à genou dans une église , tant qu'à y être, aussi bien prier... Ce que je fais !morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1139935549022620242006-01-19T10:10:00.000-05:002006-04-04T08:40:02.116-04:00Le 1er avril La poule et le coqNajera-San domingo de la calzada 28 Km<br /><br />Un vent de 40 Km souffle pendant toute la journée. L’ombre des nuages défile à mes côté et me dépassent les uns après les autres,<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/01%3A04chemin%20poule.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/01%3A04chemin%20poule.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Il y a des moments plus difficiles, des vieux tourments hantent mon esprit et provoquent chez moi le contraire de la sérénité, la contrariété. J’essaie de me raisonner. En fait, ma contrariété vient du fait que la situation est hors de mon contrôle.Je dois l’accepter : accepter ce qu’on ne peut changer et vivre le moment présent. J’ai souvent pensé que lorsqu’on vit le moment présent, il est très difficile d’être tourmenté. Le tourment appartient au passé ou au futur, mais pas au présent. Heureusement parce que le moment présent reste toujours avec nous jusqu’à la fin de notre vie, il suffit de le retrouver pour se porter mieux.<br /><br />Je croise un troupeau de 200 moutons guidé par un berger et son chien, on dirait un roi avec sa cour. C’est la première fois de ma vie que je rencontre un véritable berger. Il a l’air heureux, il sourit et me salue en m’envoyant la main. Son vaillant chien, occupé à ramener les moutons égarés ne remarque même pas ma présence.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20mouton.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20mouton.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />La télé-réalité en est maintenant à faire des émissions sur le pèlerinage. Un groupe de pèlerins espagnols sont filmés par une chaîne de télévision locale. Ils hébergent au même gîte que les autres, question de faire plus réalité… Évidemment, ils sont tous jeunes et beaux, ont les meilleurs lits et disposent d’une camionnette taxi pour les sorties en ville.<br /><br />Claude et moi pouffons de rire à regarder le spectacle. La caméra suit les moindres de leurs gestes. Claude dit : <br /><br />— C’est quoi ça, ils vont filmer le Saint-Esprit maintenant ?<br /><br />Je le regarde un instant puis j’ajoute :<br /><br />— Ne vous en faites pas avec ça, Claude, le Saint-Esprit, ils vont le mettre en postproduction.<br /><br />C'est dans la cathédrale de Santo Domingo de la Calzada, qu’on expose une poule et un coq blancs dans une cage pour se remémorer le célèbre miracle.<br /><br />La tradition rapporte qu’en ce 14e siècle, un jeune pèlerin voyageant en famille avait été injustement pendu pour vol par la faute d’une servante jalouse : pour se venger de l’indifférence du pèlerin à son égard, elle cacha une coupe en argent dans la besace du jeune homme. En dépit de ses protestations d’innocence, le pauvre Hogonell fut condamné et pendu sur le champ.<br /><br />Inquiets de retard d'Hugonell, ses parents retournèrent à Santo Domingo où, miracle, ils entendirent leur fils leur dire qu’il était toujours vivant, car St-Jacques le protégeait. Ils se précipitèrent chez le juge pour raconter le prodige. Incrédule, ce dernier répondit qu’il croirait si le coq et la poule rôtis, dont il s’apprêtait à déguster, se mettaient à chanter. Ce que les volatiles firent aussitôt en sautant du plat.<br /><br />Il y a aussi un livre d’enfants qui raconte cette légende de façon très différente. Cette histoire raconte que le jeune Hugonell fut sauvé d’une maladie mortelle lorsqu’il avait 5 ans. Sa mère, pour remercier Dieu, décida de donner à chaque année sa plus grosse poule et son plus gros coq à la personne la plus pauvre qu’elle connaissait. Le père trouva que ce sacrifice était insuffisant et décida d’amener toute sa famille en pèlerinage à Compostelle. En route vers Compostelle, ils firent halte dans une auberge de la ville de Santa Domingo. La servante cacha la coupe d’argent dans la besace du jeune pèlerin. Les policiers arrêtèrent Hugonell et saisirent tous ces biens, dont la poule et le coq qu’il transportait. Hugonell fut accusé de vol et condamné à mort. Le juge après avoir rendu son verdict demanda à sa servante de faire cuire la poule et le coq du jeune condamné. La servante garda pour elle la volaille d’Hugonell et fit cuire à la place une poule et un coq moins gros. <br /><br />Lorsque les parents s’aperçurent que leur fils ne les suivait plus, ils retournèrent au village où ils apprirent que leur fils était condamné à mort. Ils allèrent voir le juge pour demander sa clémence. Le juge leur dit: "que leur fils était aussi vivant que la poule du jeune qu'il s’apprête à manger ! ». C’est à cet instant précis que, la poule et le coq, du couple allemand s’échappèrent de la cuisine et se mire à chanter... Stupéfait, le juge décida de donner plus de crédibilité à la version du jeune Allemand et fit revenir la jeune fille pour l’interroger. La jeune fille prise de remords avoua qu’elle avait elle-même dissimulé le vase en argent. Le juge acquitta donc le jeune Hugonell.<br /><br />Je préfère de loin la deuxième version parce qu’elle témoigne plus de la magie de la vie. C’est la poule et le coq que la mère du jeune Hugonell a transportés depuis l’Allemagne qui a sauvé son fils pour la deuxième fois. Ces mêmes poules qu’elle donnait aux pauvres pour remercier Dieu. <br /><br />De retour à l’auberge, un Espagnol, proclame « haut et fort » en espagnol son d’admiration pour moi. Tous les pèlerins , une quinzaine, me regardent . Je pense qu’il fait référence à la marche dans la boue que j’avais faite à Logrono. Je ne comprends de son discours que cette phrase : « Voici, un vrai pèlerin ! » Je suis gêné, je souris, je les salue et je vais me coucher.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140118536970789432006-01-18T14:30:00.000-05:002018-04-25T11:31:14.588-04:00Le 2 avril Belorado Ma routineSan Domingo-Belorados 28 km.<br />
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<a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20plaine.jpg"><img alt="compostelle" border="0" src="https://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20plaine.jpg" style="cursor: hand; cursor: pointer; display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center;" /></a><br />
Je suis parti depuis 10 jours, assez longemps pour développer ma routine journalière. <br />
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Je me lève à 6 heures 15 pour pouvoir partir tôt. Il est agréable de traverser un village pendant que ses habitants dorment. Je suis l’étranger qui quitte les lieux; ni vu, ni connu.<br />
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Je prends mon déjeuner, composé de fruits, quelques bars tendres et du pain avec de la confiture. Il manque mon café, c’est ma quête du matin. Pour prendre ma ration de caféine, je dois trouver un bistro sur le chemin. Il arrive que je marche 10 kilomètres avant d'en trouver un. <br />
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Je marche pendant quatre heures d'affilée. J'arrête une vingtaine de minutes pour prendre une collation et je continue la randonnée pour un autre deux heures. <br />
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J’arrive à l’auberge vers 13 heures. Je lave mon linge à la main et, si la température le permet, je l’étends sur la corde à linge, sinon j’essaie de me trouver un coin sur le calorifère. C’est important de faire le lavage le plus tôt possible pour donner le temps aux vêtements de sècher. Avoir des chausettes sèches pour le lendemain est essentiel pour prévenir les ampoules.<br />
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Dès que je peux, je prends une douche, car si j'attends trop, il n'y aura plus d'eau chaude. Une douche d’eau froide, après 25 km de marche, vous transforme en bloc de glace ! Si vous ne me croyez pas, essayez, vous verrez bien !<br />
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Pour dîner , je m’achète ce qu’il faut pour faire un « sous-marin » ou pour mes amis français, un sandwich. puis, je fais la sieste. Eh oui ! on est en Espagne.<br />
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Je visite les lieux et je trouve souvent un café internet où j'écris des courriels à ma famille.<br />
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Enfin , Je vais me coucher et je dors profondément.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140367993721745722006-01-17T11:44:00.000-05:002006-04-04T08:48:12.703-04:00Le 3 avril San Juan de Ortoga La soupe à l'ailLe 3 avril Bolerado- San juan de Ortega<br />23 km<br /><br />Je marche depuis plusieurs heures lorsque Christian me rejoint. Il cherche un partenaire de marche et aimerait bien compléter le voyage jusqu'à Compostelle avec moi. Depuis le début de mon pèlerinage, je marche seul, pour moi, c'est la meilleure façon de méditer et de profiter du temps que j’ai pour mieux me connaître. Cela me permet de faire le vide, d'être à l'écoute et de vivre pleinement le moment présent . <br /><br />Je dis donc à Christian que je préfère marcher seul, il comprend. Nous allons prendre un café puis nous prenons la route chacun de notre côté. <br /><br />Malgré tout, la marche en solitaire comporte certains risques. En route vers Ortega, je manque une flèche jaune et je me perds. Je prends un chemin qui me conduit à une ferme abandonnée, dans laquelle se trouvent enfermés des chiens affamés. Leurs grognements me glacent le sang, on dirait des loups, s’ils trouvent un moyen de s'échapper, je suis bon pour des vacances gratuites à l’hôpital.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20ail.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20ail.jpg" border="0" alt="" /></a><br />J’accélère le pas, je me dirige vers une forêt. Le chemin qui mène à Compostelle est toujours bien balisé: si on se retrouve au milieu d'une forêt où le sentier est incertain c’est que nous sommes au mauvais endroit. Je retourne donc sur mes pas et arrivé à un croisement de chemins, j’aperçois Jean le pyrénéen. Enfin, j'ai retrouvé le chemin, qu'est-ce que je suis content de le revoir !<br /><br />Nous sommes cinq pèlerins à terminer l’étape au monastère San juan de Ortoga. Nous voulons tous goûter à cette fameuse soupe à l’ail que le Padre maroquin prépare aux pèlerins depuis 25 ans. Malheureusement, les pèlerins sont peu nombreux au mois d'avril et le Padre, âgé de 84 ans, ne la fait pas pendant la saison morte. Dans l’espoir de pouvoir goûter à sa soupe , nous demandons conseil à sa sœur (soeur de sang, qui vit avec lui ). Elle nous suggère de lui demander après la messe, car, dit-elle : « il fait sa soupe à ceux qui la lui demande ». Nous lui demandons , et évidemment , il accepte avec plaisir.<br /><br />La première cuillérée de la soupe à l’ail est aussi forte que de l’alcool à 95 %. Aucun virus ne peut lui résister, mon corps bout littéralement. Il y a autant d’ail dans la soupe du Padre qu’il y a de pois dans une soupe aux pois. Heureusement que je voyage seul…<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20padre.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20padre.jpg" border="0" alt="" /></a><br />La nuit est froide, Il fait 0 C, et toutes les couvertures de laine, mon sac de couchage et la soupe à l’ail suffisent à peine à me garder au chaud.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140622600246083772006-01-16T10:06:00.000-05:002006-04-04T08:55:07.646-04:00Le 4 avril Burgos. La CathédraleSan Juan de Ortega- Burgos<br />28 km<br /><br />Il n’y a pas de chauffage dans ce vieux monastère de San juan de Ortega. C’est une vielle bâtisse laissée un peu à l’abandon où seulement deux personnes y vivent en permanence, le Padre et sa soeur. Je suis seul ou presque, je partage un immense dortoir avec Roberto, un pèlerin italien. J’ai l’impression d’être dans une vielle maison hantée.<br /><br />À 5 h 30 du matin, je décide de partir. Il fait encore nuit lorsque je commence à marcher: devant moi, à l’ouest, la pleine lune se couche à l’horizon ; derrière moi, à l’est, le soleil commence à se lever. J’assiste en même temps à un coucher de lune et à un lever de soleil. C’est magnifique. C’est aussi impossible à photographier.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20km.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20km.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Ce que j’aime du chemin du camino, c’est ne pas savoir ce que tu vas voir dans la journée. Chaque pas te conduit vers de nouveaux paysages. Lorsqu’il fait beau soleil comme aujourd’hui cela est d’autant plus agréable. Les jours de pluie sont derrière moi et je profite de la chaleur du soleil. Cette étape, même si elle est de 28 km, est très agréable.<br /><br />Burgos est une grande ville, j’apprécie le retour à la civilisation. Je me détends sur une terrasse en dégustant un verre de vin. Une procession défile dans les rues de Burgos pour célébrer le dimanche des rameaux. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/parade.1.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/parade.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Ci-bas, les pèlerins de la télé-réalité arrivent à Burgos.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/00002.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/00002.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Je visite la cathédrale de Burgos. C’est une imposante cathédrale dans laquelle on expose des richesses inestimables. Le guide nous raconte son histoire et les étapes de sa construction. Comme on est dimanche, mon ami Claude demande au guide à quelle heure est la messe. <a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/burgoa%20cathe.jpg"><img style="float:right; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/320/burgoa%20cathe.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />D’un air indifférent, le guide répond qu’il n'y a plus de messes ici, qu’il faut aller ailleurs.<br /><br />Nous sommes surpris : aucune messe dans une cathédrale un dimanche ? J’ai envie de lui répondre : « Excusez-moi monsieur, pourquoi pensez-vous que les paysans ont construit cette cathédrale au juste ? Pour en faire un musée ? ».<br /><br />L’Espagne est un pays où, contrairement au Québec, les croyants pratiquants sont nombreux. S'il n'y a plus de messe à la cathédrale de Burgos, c'est pour d'autres raisons, peut-être en ont-ils fait un musée. C’est un magnifique musée rempli d’innombrable richesses... mais où est passée l’Église ?<br /><br />Claude trouve plus loin une église où l’on célèbre un mariage. Il décide d’y assister. Faut ce qu’il faut !<br /><br />Le pèlerin.<br /><br />Claude est le doyen des pèlerins, il a 65 ans. Il a fait le voyage en deux étapes : l’année dernière, il a marché de Puy jusqu'à Pampelune ; cette année, il fait le reste jusqu’à Compostelle. C’est un pèlerin facile d’accès et cultivé qui est d’excellente compagnie. Il y a des gens comme ça qu’on apprécie beaucoup. C’est comme dans la vie de tous les jours.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140720322948873432006-01-15T13:37:00.000-05:002006-04-04T08:58:34.986-04:00Le 5 avril Hontana. Le partageBurgos-Hontana<br />30 km<br /><br />Aujourd’hui , il fait beau et chaud. Je marche d’un bon pas toute la journée et j’arrive à Hontana vers 13h30.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20arbre.5.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20arbre.5.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Hontana est un tout petit village qui n’offre aucun service. Avant que je puisse prendre un repas , je devrai attendre six heures car le souper préparé par l’aubergiste est prévu pour huit heures du soir. Quand tu viens de marcher 30km, c’est long... Heureusement, j‘ai toujours avec moi quelques barres tendres qui m'aident à tenir le coup.<br /><br />Nous sommes six pèlerins affamés assis à la même table. Le repas préparé par l’Aubergiste est délicieux : une soupe avec du pain pour entrées, du jambon accompagné de salade et patate. Nous mangeons sans discuter, trop occupés à calmer notre faim.<br /><br />Arrive le dessert, l’aubergiste dépose sur la table un plateau qui contient 3 pommes et 3 oranges. Les six pèlerins se regardent, nous voulons tous prendre une orange. Il fait chaud et les oranges sont désaltérantes. <br /><br />Il est difficile dans cette simple situation de prendre la bonne attitude. Si vous prenez l’orange dont vous avez envie, vous ne pourrez pas la savourer pleinement parce que vous savez que vous aller priver les autres pèlerins de ce plaisir. Si vous laisser passer l’orange, alors vous devrez prendre une pomme dont vous n’avez pas envie.<br /><br />Le plateau passe devant mon voisin, il prend une orange , il en reste deux. <br /><br />C’est à moi , je décide de passer mon tour et d’offrir le choix à une femme dans la cinquantaine. Je lui dis que je sais qu’elle veut l’orange et l’encourage à la prendre. Ce qu’elle fait après de longue hésitation. Il en reste une.<br /><br />La suivante décide de prendre la dernière orange, sans la moindre hésitation ! <br /><br />Comme les autres pèlerins, je suis étonné de sa réaction. Je me fais à l’idée de prendre une pomme quand tout à coup la moitié de l’orange de ma voisine se trouve dans mon assiette. Voilà l’attitude à adopter ! ma voisine n’a pas hésité parce qu’elle savait ce qu’il fallait faire. Partager : 3 oranges coupées en deux font 6 demi-oranges pour 6 pèlerins heureux !morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140814369639714962006-01-14T15:30:00.000-05:002006-03-15T20:19:57.613-05:00Le 6 avril Fromista. La joieHontana-Fromista 34 km <br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/monter%20fromista.1.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/monter%20fromista.1.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />J’ai l’impression de grandir comme être humain, le chemin de Compostelle me déstabilise, il me remet en contact avec la vie sans artifice et je m’aperçois de plus en plus qu’on n’a pas besoin de grandes choses pour être heureux.<br /> <br />La sérénité est un état qui supprime tous désirs matériels. Je ne ressens pas le besoin de posséder de bébelles, elles m’apparaissent comme étant futiles. Içi, il n’y a pas de publicité pour me dire qu’elles sont essentielles à mon bien-être, et même s’il y en avait, je ne la croirais pas. Comment pourrais-je être plus heureux avec un téléviseur à haute définition de 10 000 $ ou avec une luxueuse Porche ? Je suis déjà, en ce moment précis, un homme heureux et libre. Je ne fait que marcher sur un sentier et je ressens de la joie.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/chemin%20fromista.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/chemin%20fromista.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a>morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1140989267885882642006-01-13T16:19:00.000-05:002006-03-15T20:20:39.310-05:00Le 7 avril Calzadilla. La CigogneFromista- Calzadilla de la Cueza.<br />38 kilomètres<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20cicogne.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20cicogne.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Je pense à ma famille à tous les jours. J’ai un garçon de 6 ans, Félix et une fille de 9 ans, Camille. Je leur écris souvent des courriels. En voici des extraits :<br /><br /><span style="font-style:italic;">Ola Félix !<br /><br />J’ai beaucoup marché ces derniers jours, hier par exemple, j’ai marché 38 km, c’est plus facile, car je marche dans une plaine et il fait froid.<br /><br />Tu sais quoi Félix ! il y a un oiseau très étrange qui m’a suivi pendant 5 kilomètres, c’était au bord d’un ruisseau, l’oiseau s’appelle une cigogne. C’est un oiseau très gros qui fait un nid gigantesque dans les arbres. Cet oiseau jouait à la cachette avec moi, j’ai essayé de le photographier quatre fois, à chaque fois que je sortais ma caméra, il se sauvait. Alors, comme j’avais raté mon coup trois fois, j’ai décidé de garder mon appareil ouvert. J’étais sûr que la cigogne ne se montrerait plus et, paf ! elle est sortie de nulle part et elle est passée à dix mètres de moi et je l’ai photographiée.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20photo.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20photo.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Plus loin, il y avait des hirondelles qui s’amusaient à faire le tour de moi, puis les grenouilles ont chanté de belles chansons, il devait y avoir 30 grenouilles, parce qu’elles chantaient fort.<br /><br />Je t’aime !<br /><br />À Camille,<br /><br />Bonjour mon cœur d’amour, j’espère que tu vas mieux, ton vieux père commence à être sérieusement en forme. Lorsque je serai de retour, nous ferons en famille, une marche dans la forêt, je suis sûr que tu vas aimer le grand air.<br /><br />Hier, j’ai pris une route déserte de 18 kilomètres. Je pouvais voir eniron 6 km devant moi. Imagine, tu marches une heure, tu arrives en haut d’une petite colline pour constater que tu as encore un autre 6 km à marcher. Cela a été ainsi toute l'après-midi. À la fin, j’étais un peu tanné, mais je suis arrivé au village comme d’habitude.<br /><br />Je t’aime !</span><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/cazualla.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/cazualla.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />J’arrive à Carrion de los Cordes vers midi, il me reste encore 18 kilomètres à parcourir avant de rejoindre l’auberge de Cazadilla, je décide donc d’arrêter dîner. Je trouve une épicerie et demande un morceau de fromage pour me faire un sandwich. La fromagère sort du fond de son tiroir, un restant de fromage emballé dans du papier cellophane. Je l’achète et je pars à la recherche d'un endroit pour manger.<br /><br />Je trouve un banc de parc sur lequel je prépare mon sandwich. À l’aide de mon canif, j’essaie de trancher le fromage, mais il est dur comme de la roche et j’en suis incapable. Il ne sent rien, on dirait une pierre à savon. Je retourne donc à l’épicerie afin de l’échanger pour un autre. La fromagère est catégorique : pas de remboursement. Je cogne le fromage contre le comptoir, pour lui signifier qu’il est périmé et séché. Elle ne veut rien entendre et refuse de me rembourser. Ça ne faisait pourtant seulement 5 minutes que j'étais sorti de l'épicerie !<br /><br />Après le dîner, dans une rue du centre-ville, une vielle femme qui ressemble à une sorcière me bloque le chemin. Elle ouvre sa bouche et pointe son doigt en direction de sa langue et de ses dents noires. Je lui donne un sac d’amandes que j’ai dans mon sac. Elle prend les amandes et me les remet. Elle veut de l’argent. Je regarde dans ma poche et je laisse tomber 3 euros dans son panier. En baissant les yeux, je remarque qu’elle a des souliers neufs et qu’elle est mieux habillée que la moyenne des gens. Je sens qu’il y a quelque chose d’étrange dans sa façon d’être et je décide de reprendre 2 euros. Mauvaise idée, elle se met en colère et commence à m'engueuler. Je pars et je lui dis d’aller se faire cuire un œuf ! Incroyablement, j’allais la revoir à Compostelle¨soit 400 km plus loin, en train de quêter au bord de la cathédrale. Aussitôt qu’elle m’a reconnu, elle a recommencé à me crier après. Elle devait dire quelque chose comme :¨ pourquoi as-tu repris de l’argent ? Pourquoi ? . C’était une quêteuse professionnelle.<br /><br />En Espagne, il n’y a presque pas de clochard et de quêteux, parce qu’ils sont pris en charge par le gouvernement et l’Église. À vrai dire, c’est la seule quêteuse que j’ai rencontrée durant mon voyage. <br /><br />Inutile de dire que Carrion de los cordes n’a pas été ma ville préférée !morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1141597331050077002006-01-12T17:14:00.000-05:002006-04-04T09:03:55.120-04:00Le 8 avril Sahagun. La communautéCalzadilla de la Cueza- Sahagun<br />24 km<br /><br />Aujourd’hui, c’est Jeudi saint, jour de congé pour les habitants de Sahagun. Les restaurants, les bars et les places publiques sont bondés. C’est un jour de fête: les enfants jouent, les amis rigolent, les amoureux s’embrassent, les personnes âgées conversent.<br /><br />Vers 19 heures, les habitants se regroupent et marchent dans la même direction. Je me demande où ils se dirigent? vont-ils à un concert ? Je les suis. Je monte une ruelle qui débouche sur la place de l’église. Ils entrent dans la cathédrale, je décide de me joindre à eux. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/cate%3F%3F%20sahagun.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/cate%3F%3F%20sahagun.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Mille personnes sont assises dans l’église de Sahagun. Je me faufile discrètement près d’une colonne à l’arrière. L’évêque du diocèse choisit un fidèle au hasard, se met à genou et lui lave les pieds. Je pense qu’il fait cela afin de remémorer l’épisode où Jésus lave les pieds de ses disciples. Plus tard, les paroissiens se donnent la paix, c’est avec chaleur que plusieurs d’entre eux sont venus me serrer la main pour me souhaiter la paix et la bienvenue. L’étranger que je suis est touché par leur accueil. Je viens de prendre conscience qu’il y a dans cette communauté un désir de fraterniser et de collaborer avec les autres. <br /><br />Après la messe, les familles se réunissent à la plaza. Les enfants sont fébriles, signe que quelque chose d’inusité se prépare . Puis, des sortes de chars allégoriques commencent à déambuler dans les rues de la ville. Ils représentent différentes périodes de la vie de Jésus. Ils sont portés par une trentaine d’ hommes costumés avec des habits mauves et des chapeaux pointus. Les porteurs ont le visage voilé pour qu’on ne puisse pas les reconnaître. C’est une tradition qui fut établie pour protéger l’identité de ceux qui font pénitence. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20procession.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20procession.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Une fanfare accompagne le cortège. Les musiciens âgés entre 8 ans et 75 ans jouent de la trompette, de la clarinette, du tambour et de la flûte.<br /><br />Pour terminer, les familles joignent le cortège en marchant au rythme de la musique. <br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/parade.2.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/parade.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Je retourne à l’auberge le cœur léger. Dorénavant, pour moi, l’esprit d’une communauté existe ; elle est façonnée par le désir de ses membres à vouloir fraterniser et collaborer entre eux.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1141760297961600342006-01-11T14:26:00.000-05:002006-04-04T09:08:57.850-04:00Le 9 avril Mansilla de la Mulas. VictorLe 9 avril Sahagun – Mansilla de la Mulas.<br />38 kilomètres<br /><br />Aujourd’hui, c’est Vendredi Saint, tous les commerces sont fermés. Je n’ai pas fait de provision et je dois marcher 38 kilomètres pour arriver à la prochaine auberge. Il me reste deux gommes à mâcher et un morceau de pain. C’est peu considérant l’énergie que je dois dépenser. <br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20arbuste.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20arbuste.0.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Lorsqu’on marche, on n’a jamais faim, on a soif, mais on ne ressent pas la faim. C’est pourquoi, je décide de ne pas faire de longue pause. Je ne veux pas que la faim se manifeste, je bois beaucoup d’eau afin de garder mon estomac plein.<br /><br />La marche est monotone, je suis un long sentier droit à côté duquel on a planté des arbres à tous les 9 pieds. Pour combattre l’ennui, je marche avec une cadence rapide et un rythme constant.<br /><br />Je croise une Allemande que j’ai rencontrée, il y a une dizaine de jours, elle boite, elle ne marche plus avec son chum, car dit-elle, ils se sont séparés, son amoureux marchant trop vite pour elle. Elle voyage maintenant avec une amie qu’elle s’est faite à l’auberge. Je trouve bizarre que son chum n’ait pas voulu ralentir sa cadence. Après tout, elle l’avait suivi pendant 400 kilomètres à son rythme. Maintenant que sa blessure l’empêche de suivre sa cadence, il la laisse derrière. Cette situation lui a permise de découvrir son chum telle qu’il est . Et s’ils étaient mariés et qu’elle avait eu le cancer, l’aurait-il accompagné dans sa maladie ? Il aurait bien fallu qu’il ralentisse sa course, non ? <br /><br />À la fin de la journée, la chaleur de mon corps ne suffit plus à huiler la machine. J’ai mal aux genoux et il me reste 6 kilomètres. Cette journée de 8 heures de marche sans arrêt développera une minuscule ampoule. Elle m’aura appris également les limites de mon corps. Ma limite, c’est 38 kilomètres de marche en huit heures. Voilà !<br /><br />Arrivée à destination, ma seule préoccupation est de manger, j’ai faim, très faim et il me faut trouver un restaurant. Cyrus le Suisse sait où on peut trouver un restaurant ouvert ! je vais avec lui remplir mon estomac qui crie famine. <br /><br />Entré à l’auberge, Jean le Pyrénéen se détend au soleil. Il me dit qu’il aimerait bien trouver un endroit pour inscrire son nom afin qu’il puisse le retrouver lors de son prochain pèlerinage. Nous pensons à divers endroits. Prémonition pour ce qui allait suivre !<br /><br />Je décide d’aller à la messe. Encore une fois, l’église est remplie à craquer, une foule de 500 personnes y est présente. Il ne reste que deux places de libres. Elles sont situées à l’arrière à l’avant-dernier banc. Je m’assois et j’écoute la messe. Une dame arrive, je me déplace à gauche d’une place. L’église est maintenant remplie à pleine capacité. Je regarde devant moi, je remarque que quelqu’un a gravé avec un couteau le nom d’une personne. Je lis ce nom, c’est écrit ¨ VICTOR¨. Je n’arrive pas à le croire, je me frotte les yeux ! c’est très clairement écrit ¨ VICTOR ¨, un nom russe peu courant en Espagne.<br /><br />Ma voisine, qui remarque mon étonnement, me demande si je parle allemand, je lui réponds que non, puis je lui montre le nom de Victor et je lui dis, en anglais, que c’est le nom de mon père. Elle sort ses lunettes pour regarder l’inscription puis elle me sourit.<br /><br />Après la messe, avec mon ongle, j’écris : " EM " pour Éric Morin en dessous de VICTOR.<br /><br />Les mathématiciens, à vos calculatrices. Quelle est la chance que je vois inscrit le nom de mon père à la place où je dois m’asseoir dans une église en Espagne ?<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/04170012.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/04170012.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a>morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1141852130568392192006-01-10T16:08:00.000-05:002006-03-15T20:08:52.350-05:00Le 10 avril Leon. La processionMansilla de la Mulas-Leon<br />18 kilomètres<br /><br />J’ai découvert une petite ampoule sur mon orteil gauche. Depuis le début de mon pèlerinage, ce que je redoute le plus, ce sont les ampoules. Lors de mon entraînement, j’ai marché tous les jours 9 kilomètres, avec mon sac à dos, par crainte de ces petits bobos. Finalement, cela ne fait pas si mal, la douleur appréhendée est bien plus douloureuse que celle de la réalité. <br /><br /> Je vois régulièrement des pèlerins, qui marchent difficilement, avec les pieds couverts d’ampoules. Tous se soignent et apprennent à s’occuper d’eux-mêmes. Ils développent un rituel, une façon précise de soigner leurs blessures. Ils deviennent des experts-chirurgiens et des infirmières attentionnées les uns envers les autres. La douleur physique les accompagne, ils l’apprivoisent et en parlent à l’occasion. Quoiqu’elle soit souvent dans leurs pensées, ils continuent toujours à marcher vers Compostelle. <br /><br />Ils ont, tout comme moi hier, dépassé leur limite. Nous devons respecter nos limites, et pour les respecter, il faut les connaître. C’est aussi ça grandir ! <br /><br />J’arrive à l’auberge de Léon à 11h30 au moment où elle ouvre ses portes. C’est certes la plus grosse auberge que j’ai vue depuis que je suis parti. Il y a beaucoup de monde, les familles profitent du congé pascal pour marcher sur le sentier jusqu’à Leon afin d'y célébrer la fête de Pâques.<br /><br />Je pourrais essayer de décrire la procession de Leon avec de longues phrases agrémentées d’adjectifs, mais à quoi bon ? J’ai des photos ! Prenez le temps de les regarder !<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession%20flute.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession%20flute.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession%201.0.jpg"><img style="float:left; margin:0 10px 10px 0;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession%201.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession%20cat.jpg"><img style="float:center; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession%20cat.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession%202.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession%202.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br /><br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/procession%20enfant.0.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/procession%20enfant.0.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a>morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1142088964618134312006-01-09T09:51:00.000-05:002006-03-15T20:09:40.523-05:00Le 11 avril Villar de Mazarife. Le songe<a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/cathedrale%20de%20L%3F%3Fon.jpg"><img style="float:right; margin:0 0 10px 10px;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/320/cathedrale%20de%20L%3F%3Fon.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Leon-Villar de mazarife<br />21 kilomètres<br /><br />Aujourd’hui, c’est dimanche de Pâques, je me lève à 7 heures, je déjeune, je cause un brin avec les autres pèlerins puis je vais à la Cathédrale de Léon. La célébration la plus tôt se donne à midi, c’est beaucoup trop tard pour moi. La prochaine étape est à 35 kilomètres d’ici, si je veux m’y rendre avant 7 heures du soir, je dois partir maintenant. Je décide donc de poursuivre ma route en direction de Hospital de Orbego.<br /><br />Je marche pendant une dizaine de minutes quand un Français accompagné de son jeune fils me demande les directions pour aller à la basilique de Léon. Il y a une messe à 9 heures, me dit-il. Nous faisons connaissance puis on se met à sa recherche. Finalement, nous la trouvons, mais elle est désert et il n'y pas âme qui vive à l’intérieur. Déçu, on s'apprête à partir lorsque nous entendons un chant religieux. Nous suivons la mélodie qui nous conduit à une petite chapelle située à l'arrière de la basilique, une dizaine de personnes s'y sont rassemblées pour entendre la messe. Nous décidons de nous joindre à eux.<br /><br />Après la célébration , mon copain Français m’explique qu’il y a trois églises importantes où l’on peut rendre hommage aux fondateurs du chemin de Compostelle ; la première église est à San Domingo de la Calzada où l’on peut honorer Santo Domingo, moine bénédictin ingénieur de pont et constructeur de route ; la deuxième église est à San Juan de Ortoga où se trouve son disciple Juan de Ortega qui a continué son œuvre et le troisième, ici même, à la basilique où l’on peut rendre hommage au bienheureux Isidore, évêque, confesseur et docteur. Et bien voilà, c’est fait, j’ai été à ces trois endroits et j’ai rendu hommage à ces pionniers du chemin de Compostelle.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/Basillique%20de%20leon.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/Basillique%20de%20leon.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />Après 20 kilomètres de marche, je suis fatigué, il fait chaud et je n’ai pas assez d’énergie pour me rendre jusqu’à Hospital de Orbego. Je décide plutôt d’arrêter à Villar de Mazarife, un petit village où une maison rustique sert d’auberge aux pèlerins. <br /><br />Tout est fermé, sauf un petit bar où les hommes du village se sont réunis pour jouer aux cartes. Il y a tellement de fumée que le brouillard s’y est installé. <br /><br />Le barman m’informe que la propriétaire de l’épicerie ouvrira son commerce si je cogne à la porte. Je vais à l’épicerie du coin, je cogne timidement à la porte, une gentille dame dans la soixantaine apparaît sur le balcon : « Una momento ! » me dit-elle. J’achète ce qu’il faut pour me faire un bon repas et je la remercie. C’est pas Wallmart qui ferait ça !<br /><br />Je dors dans une chambre que je partage avec Roberto l’Italien. Je fais un magnifique rêve, en fait, cela ressemblait davantage à un songe. Contrairement à un rêve, le songe nous semble plus réel et fait appel à notre conscience. Nous sommes plus conscients de notre moi que dans un rêve où tout nous apparaît comme étant nébuleux. <br /><br />Je rêve donc que je joue avec mes enfants. Nous sommes tous des esprits et nous volons dans l’espace. Nous suivons un vieux satellite qui dérive et nous nous amusons à le dépasser. Je suis redevenu un enfant et c’est comme enfant et non comme père que je joue avec eux.<br /><br />Je me réveille, je dois aller faire mes besoins à l’extérieur, les toilettes sont dehors dans la cour de l’auberge. Je lève la tête, il y a des milliers étoiles. C’est d’une grande beauté ! je suis sur une plaine qui est à 1000 mètres d’altitude, il n’y a pas une seule lumière à des kilomètres.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1142284604444214432006-01-08T16:02:00.000-05:002006-03-16T08:58:20.430-05:00Le 12 avril Astorga. La solitudeVillar de Mazarife-Astorgal<br />32 kilomètres à 260 km de Compostelle<br /><br />Il fait froid, Roberto l’Italien, mon compagnon de chambre, grelotte. Je lui donne l’épaisse couverture de laine qui m’a tenu au chaud pendant la nuit. Il me fait un signe de la main pour me remercier. C’est encore sombre dehors, mais pour moi ce n’est pas un obstacle, j’aime regarder le lever du soleil, je descends les escaliers de la maison sans faire de bruit, je déjeune et je marche seul dans les rues du petit village. <br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20mazarife.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20mazarife.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />J’ai ma tuque sur la tête, mais je sais qu’elle fera bientôt place à mon chapeau soleil. Le soleil brûlant n’est qu’à quelques heures de marche. Le matin, sur la plaine de la Maseta, le mercure peut descendre jusqu’à 0 C pour remonter par la suite jusqu’à 25 C au milieu de l’après-midi.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20astorga.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20astorga.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Mon départ de Léon, plus tard que prévu, a comme conséquence que je ne marche plus avec les mêmes pèlerins. La plupart des pèlerins marchent la même distance au cours de la journée. Ils se quittent le matin pour se retrouver le soir à l’auberge. Mes compagnons de voyage habituel couchent probablement dans la ville suivante. Ils me manquent, il n’y aura pas ce soir de conversation et de souper en famille.<br /><br />Je me sens seul. Je passe la soirée à flâner dans la ville. Je prends une bière dans un bar, je visite la cathédrale et je contemple le coucher de soleil. Je laisse le temps s’écouler, je me tais. Je me dis que le silence est quelque chose de fascinant, car on a toujours l’impression de perdre son temps lorsqu’on s’assoit et qu’on ne fait rien de spécial. Mais en réalité, être avec soi-même pendant quelques heures à réfléchir à tout et à rien, ne devrait pas être une expérience angoissante, mais plutôt une chance unique de s’écouter et de se regarder. Après tout, suis-je si ennuyant que l’idée de passer du temps avec moi-même suffise à m’angoisser ? <br /><br />Parfois j’ai l’impression que mon ange gardien me laisse seul. Pour me permettre de savoir qui je suis réellement. Puis, après avoir cheminé un certain temps, je le retrouve à m’attendre patiemment prêt à repartir avec moi sur le chemin de ma vie. <br /><br />Je me souviens de ce coucher de soleil, de cette lumière du soir, si douce et si belle qui m’apaisent avant d’aller me coucher.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1142452717946673062006-01-07T14:43:00.000-05:002006-03-28T20:57:30.113-05:00Le 13 avril Rabanal. La récolteAstorga-Rabanal del Camino<br />20 kilomètres<br /><br />Enfin des montagnes, des montées, des parcours sinueux ! je suis sur le point de sortir de la Mesata, cette plaine aux horizons sans fin.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20rabanal.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20rabanal.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Vers la fin de la journée, je fais connaissance d’une Espagnole qui parle un excellent anglais. C’est la première fois que j’ai une réelle conversation avec un Espagnol local. Elle a pris le train à Noia, un village de pêcheurs non loin de Compostelle, pour se rendre à Léon. Elle profite d’un congé pour retourner chez elle à pied par le sentier de la camino. <br /><br />Nous marchons ensemble les derniers kilomètres avant d’arriver à Rabanal. Elle me parle de la difficulté qu’ont les jeunes Espagnols à s’acheter une maison. Depuis que l’Espagne s’est jointe à l’Union européenne, le coût de la vie a monté en flèche. En grande partie, me dit-elle, parce que les économies provenant du marché noir et faites en ancienne monnaie ( pesetas ) ont dû être liquidé avant que l’euro face office de nouvelle monnaie. Ce qui a augmenté la demande pour les produits de luxe et conséquemment haussé le prix des autos et des maisons. <br /><br />Nous discutons également du conflit qu’il y a entre nos deux pays sur la zone de pêche. Selon le gouvernement canadien, les pêcheurs espagnols s’aventurent un peu trop près de leur zone de pêche. Cet avis n’est évidemment pas partagé par mon amie.<br /><br />Arrivés à Rabanal, nous allons prendre une bière dans un bar. À la télévision, un reportage montre des images de pêcheurs lançant un filet à la mer. Je lui dis : « regarde ! des Espagnols en train de pêcher du poisson canadien ! ». Elle éclate de rire et m’offre une bière afin de préserver les bonnes relations entre nos deux pays. <br /><br />À l’auberge de Rabanal, un tenancier écossais portant fièrement son kilt vient nous accueillir. Un homme rempli de joie de vivre nous serre la main et nous explique les règles de la maison. Son accueil est remarquablement chaleureux. Les bénévoles de cette auberge éprouvent un réel plaisir à prendre soin de leurs invités. J’écris dans le livre d’Or : « J’ai été reçu comme un prince qui revient chez lui après un long voyage, bénie soit votre auberge, vous êtes le meilleur. »<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20auberge.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20auberge.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br /><br />En soirée, je lis les mémoires d’un pèlerin. Je note une phrase qu’il a écrite dans son journal : « la seule expérience qui puisse donner un fondement indestructible à l’homme, c’est d’être seul pour découvrir ce qui le porte lorsqu’il n’est plus en état de se porter lui-même. »<br /><br />Je revois mon ami Claude. Nous allons prendre un verre de vin. Il me parle d’une période de son enfance qu’il l’a particulièrement marqué. <br /><br />À l’époque de la seconde Guerre mondiale, lorsque les Allemands envahirent sa petite ville située en Alsace, son père était l’un des rares mécaniciens capables de réparer des tanks. L’armée allemande, qui avait grandement besoin de ses services, l'obligea à travailler pour elle. Son père fut durement jugé par les citoyens qui ne lui ont jamais pardonné d'avoir collaborer avec les allemands.<br /><br />Il devait être difficile de refuser de coopérer avec les Allemands, surtout si vous aviez des habilités dont ils avaient besoin. Les Allemands auraient-ils forcé un libraire français à l’effort de guerre allemand ? Il est facile de juger, lorsque nous n’avons pas de famille à protéger et qu’on n’est pas soumis à la pression des officiers allemands. J’ai de la sympathie pour Claude. Vivre dans un monde où ton père, le héros de ton enfance, est jugé et condamné par la collectivité, cela doit être difficile à porter.<br /><br />Nous discutons de la guerre, je demande à Claude, comment des gens aussi intelligents et bons que les Allemands peuvent-ils en arriver à permettre qu’un holocauste puisse se faire dans leur pays.<br /><br />Après la guerre 14-18, l’économie de l’Allemagne n’allait pas bien. La plupart des Allemands croulaient sous les dettes et faisaient faillites les uns après les autres. Les fermiers allemands, par exemple, après plusieurs mauvaise récoltes se firent saisir leurs terres par des banquiers juifs. La perte de leur patrimoine et de leur niveau de vie engendra une haine profonde et sournoise du peuple juif, car les Allemands tenaient les Juifs responsables de leurs malheurs. Adolphe Hitler exploita cette haine avec un discours antisémite, en promettant à la nation un avenir meilleur.<br /><br />La guerre se prépare longtemps à l'avance. Elle se construit jour après jour, un peu comme on cultive son jardin. D'abord la graine de la haine est semée dans le cœur des hommes, puis après un certain temps , lorsque la haine est suffisamment répandue et développée, un jardinier ( Hitler dans le cas de l’Allemagne) vient la récolter. Et c’est grâce à sa récolte qu’il réalise sa guerre et son génocide.<br /> <br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20mort.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20mort.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a>morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1142608481622309142006-01-06T10:12:00.000-05:002006-03-21T09:27:15.270-05:00Le 14 avril Ponferrada. Les pierresRabanal- Croix de Fer- Ponferrada<br />33 km<br /><br />Au sommet des montagnes du Bierzo, se trouve la Cruz de Ferra, la célèbre croix au pied de laquelle les pèlerins laissent des pierres provenant de leur pays.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20montagne.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;"src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20montagne.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Depuis 20 jours, je transporte six pierres dans mon sac à dos afin de les déposer au pied de cette croix.Ces cailloux proviennent de la Gaspésie, Félix, mon fils les a ramassés sur la plage de Carleton. Mon père, Victor a gravé sur chacune des pierres notre nom. Il y a la pierre de Suzie, ma blonde; celle de Camille, ma fille; celle de Félix, mon fils; celle de Victor,mon père; celle de Pierrette, ma mère et la mienne. Nous avons symboliquement associé une prière, un souhait ou un vœu à la pierre sur laquelle est gravé notre nom.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20roche.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20roche.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Certains diront que ce n’est pas raisonnable de transporter ce poids supplémentaire. Ces pierres ne sont d’aucune utilité : ils ne m’habillent pas, ils ne me nourrissent pas et ils ne m’informent pas. C’est vrai. Mais, elles sont aussi pour moi une motivation. Elles touchent mon cœur, car elles représentent les prières de gens que j’aime, et c’est mon cœur qui fait avancer mes pieds pour atteindre le sommet de cette montagne. <br /><br />La motivation que me procurent ces roches est plus importante que l’effort qu’il m’en coûte de les transporter. Le cœur gagne sur la raison. L’invisible gagne sur le tangible. Il en est souvent ainsi dans la vie.<br /><br />À 1490 mètres d’altitude, au pied de la Cruz de Ferra, je dépose les pierres. Un pèlerin me photographie au sommet de la colline de roche.<br /><br /><a href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20croixfer.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20croixfer.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />Je descends l’autre versant de la montagne et j’admire les paysages.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20paysage.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20paysage.jpg" border="0" alt="compostelle" /></a><br />L’auberge de Ponferrada a été rénovée complètement grâce au don d’un millionnaire suisse. Cela a dû lui coûter beaucoup d’argent, parce que cette auberge est un hôtel trois étoiles. Lorsque j’arrive, les tenanciers me donnent du jus et des bonbons, puis une bénévole dans la soixantaine prend mon sac à dos pour le transporter dans ma chambre qui est au deuxième étage. C’est pas mal comme service…morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.comtag:blogger.com,1999:blog-21732921.post-1142950642253300532006-01-05T09:03:00.000-05:002006-03-23T15:01:52.240-05:00Le 15 avril Villa de Franca. Les disciples d'EmmaüsPonferrada - Villa de Franca del Bierzo<br />24 km à 180 km de Compostelle<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20ponferrada.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20ponferrada.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Je marche 6 km sans voir la moindre flèche jaune. Ce matin, j'ai l'impression de tourner en rond, j'ai dû manquer une indication quelque part. Pas de flèche, pas de pèlerin et pas de sentier, c'est évident, je suis perdu.<br /><br />J’angoisse, ce n’est pas un sentiment agréable, mais il a sa raison d’être. C’est un signal qui m’avertit qu’il faut agir et changer quelque chose pour retrouver mon chemin. Sans mon angoisse, je ne ferais rien, je marcherais pendant des heures dans la mauvaise direction. C’est comme dans la vie, lorsque la déprime frappe fort, mon angoisse m’oblige à agir afin de me redécouvrir et de me remettre sur la bonne voie. <br /><br />J’essaie de trouver des informations qui pourraient m’aider à retrouver mon chemin. Le soleil est dans mon dos. C’est bon signe, je vais au moins dans la bonne direction. J’aperçois deux pèlerins britanniques qui marchent devant moi, ils entrent dans un café. Assis à la table, une carte routière dépliée de tout son long, ils argumentent sur leurs positions. Je souris, on dirait une chicane de vieux couple, c’est sûrement des amis de longue date. John et Tom me demandent si je sais où je suis. J’en n’ai pas la moindre idée. <br /><br />La serveuse arrive, nous sert le café et pointe avec son doigt notre emplacement exact. On est à peu près à six kilomètres à l’ouest du sentier. <br /><br />J’arrive à Villa de Franca vers 13h30, je lave mon linge, je prends ma douche, je mange et je fais ma sieste. Ensuite, je descends au centre-ville, car à Villa de Franca on monte ou l’on descend, c’est un mini San Francisco. Je retrouve Cyrus le Suisse, Pépé et Claudine dans un café de la ville.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/1600/compostelle%20villa.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;" src="http://photos1.blogger.com/blogger/3122/2006/400/compostelle%20villa.jpg" border="0" alt="" /></a><br />Lors de mon retour, au pied de la côte qui mène à l’auberge, j’entends des voix qui chantent en latin. Il y a un monastère tout près, je crois qu’il s’agit d’une séance de prière faite par les moines.<br /><br />Arrivé au sommet, je constate que les paroles sont chantées en français, ils proviennent d’une soixantaine de jeunes qui assistent à la messe à l’extérieur de l’église. La messe est célébrée par deux prêtres ; un noir africain et un blanc français. Ils remarquent mon entrée. Je reconnais des pèlerins assis sur le gazon à l’arrière du groupe d’adolescents, je m’assois près d’eux. <br /><br />La lecture de l’évangile débute, c’est l’évangile selon St<br />-Marc les disciples d’Emmaüs. (Luc 24.13-55)<br /><br />Ce même jour, deux disciples se rendaient à un village appelé Emmaüs, qui se trouvait à environ deux heures de marche de Jérusalem. Ils parlaient de tout ce qui s'était passé. Pendant qu'ils parlaient et discutaient, Jésus lui-même s'approcha et fit route avec eux. Ils le voyaient, mais quelque chose les empêchait de le reconnaître. Jésus leur demanda : « De quoi discutez-vous en marchant. » Et ils s'arrêtèrent, tout attristés. L'un d'eux, appelé Cléopas, lui dit : « Es-tu le seul habitant de Jérusalem qui ne connaisse pas ce qui s'est passé ces derniers jours ? » -« Quoi donc ? » leur demanda-t-il. Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth ! C'était un prophète puissant ; il l'a montré par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple. Les chefs de nos prêtres et nos dirigeants l'ont livré pour le faire condamner à mort et l'ont cloué sur une croix. Nous avions l'espoir qu'il était celui qui devait délivrer Israël. Mais en plus de tout cela, c'est aujourd'hui le troisième jour depuis que ces faits se sont passés. Quelques femmes de notre groupe nous ont étonnés, il est vrai. Elles se sont rendues tôt ce matin au tombeau mais n'ont pas trouvé son corps. Elles sont revenues nous raconter que des anges leur sont apparus et leur ont déclaré qu'il est vivant. Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau et ont trouvé tout comme les femmes l'avaient dit, mais lui, ils ne l'ont pas vu. » Alors, Jésus leur dit : « Gens sans intelligence, que vous êtes lents à croire tout ce qu'ont annoncé les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Messie souffre ainsi avant d'entrer dans sa gloire ? » Puis il leur expliqua ce qui était dit à son sujet dans l'ensemble des Écritures, en commençant par les livres de Moïse et en continuant par tous les livres des Prophètes.<br /><br /> Quand ils arrivèrent près du village où ils se rendaient, Jésus fit comme s'il voulait poursuivre sa route. Mais ils le retinrent en disant : « Reste avec nous ; le jour baisse déjà et la nuit approche. » Il entra donc pour rester avec eux. Il se mit à table avec eux, prit le pain et remercia Dieu ; puis il rompit le pain et le leur donna. Alors, leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent ; mais il disparut de devant eux. Ils se dirent l'un à l'autre : « N'y avait-il pas comme un feu qui brûlait au-dedans de nous quand il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures ? »<br /><br /> Ils se levèrent aussitôt et retournèrent à Jérusalem. Ils y trouvèrent les onze disciples réunis avec leurs compagnons, qui disaient : « Le Seigneur est vraiment ressuscité ! Simon l'a vu ! » Et eux-mêmes leur racontèrent ce qui s'était passé en chemin et comment ils avaient reconnu Jésus au moment où il rompait le pain. <br /><br />Après la lecture, le prêtre donne son homélie. À mon avis et l’avis des autres pèlerins présents, c’est l’une des homélies les plus ennuyants qu’il m’a été donné d’écouter. Certains pèlerins, surtout les plus âgés sont choqués par le discours monocorde du prêtre qui ne risque pas d’intéresser les jeunes. Quant à moi, je trouve dommage que ces adolescents ne fassent pas le pèlerinage à pied. Ils sont transportés en autobus jusqu’à Compostelle.<br /><br />Vers la fin de la messe, les jeunes se mettent à chanter, je me lève et me dirige vers l’auberge en leur tournant le dos. Puis le prêtre dit « Je remercie les pèlerins de s’être joints à nous. » <br /><br />Je me retourne pour voir si le prêtre s’adresse à moi, tous les adolescents sont debout et me regardent. Je leur envoie la main, puis d’un coup, les mains des soixante adolescents se lèvent pour me saluer. <br /><br />Je sens un grand sentiment de paix en moi.morinhttp://www.blogger.com/profile/11776046050005099701noreply@blogger.com