vendredi, février 17, 2006

Le 22 mars 2004 – Le départ Montreal- St-Jean Pied de Port.

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Après quatre mois d’entraînement, le jour du départ est finalement arrivé. Suzie vient me conduire à l’aéroport trois heures avant mon départ. Nous passons ces dernières heures ensemble dans ce village fantôme qu’est devenu l’aéroport de Mirabel. Nous nous amusons à se faire prendre en photo par une distributrice et nous allons souper à la cafétéria.

C’est l’heure de l’embarquement. Elle m’accompagne jusqu’au contrôle des bagages. Je me sens un peu nerveux, je sais que je pars pour six semaines et que cela ne sera pas toujours facile. Suzie, toujours égale à elle-même, est calme et de bonne humeur. Il n’y aura pas d’au revoir pénible, juste un baiser et un câlin. On se revoit plus tard, je vais t’écrire se dit-on. Je la regarde se diriger vers la sortie. Je me dis que j’ai vraiment eu de la chance de rencontrer cette femme dans ma vie.

L’avion attérrit à Paris à l’heure et c’est tant mieux, car je dois prendre le train jusqu’à Bayonne. Afin de m’acheter un billet de train, je me rends à la gare qui est annexée à l’aéroport. J’apprends qu’il n’y a pas de départ pour Bordeaux aujourd’hui. Il faut donc que j’aille à la gare de Monparnasse qui se trouve à Paris. Il est 11h10 et le train part à 12h15 précise.

Éric la panique, je cours comme un malade : je prends le métro, je fais un transfert, je me perds et j’arrive à la gare de Montparnasse à midi, un bon vingt minutes à l’avance.

Il est 18 heures , lorsque j’arrive à la gare de Bayonne. Cette fois, je prends un petit train d’un seul wagon dont je suis le seul passager. Je suis très fatigué, je n’ai pas dormi depuis plus de 24 heures, mais le changement drastique de culture me mets sur le « HI ».

J’aperçois les pics blancs des Pyrénées. Ce n’est pas de bon augure, l’année dernière; il y a deux pèlerins qui sont morts de froid dans les montagnes. Ils ont marché pendant une importante chute de neige. Ils se sont perdus et sont morts de froid. Il faudra peut-être que je passe par la route.

compostelle
La locomotive arrive à St-Jean Pied de Port, une jolie femme est là pour m’accueillir :

-Good evening !

Elle a un drôle d’accent, je devine qu’elle vient de l’Australie. Elle regarde tout autour comme si elle cherchait quelqu’un.

- Are you Alone ?

— Oui, eh… yes.

Elle prend un air triste. Je trouve que c’est une bien drôle de façon d’accueillir des gens ! Mais, je ne m’entendais pas à voir personne. Alors, je suis bien content d’avoir un guide. Sur la route de l’auberge, elle m’explique qu’elle attend son copain depuis deux jours, iI devait arriver hier d’Australie. Elle me donne de l’information sur le sentier, la météo, les restaurants. Je lui dis que je suis honoré de l’avoir comme guide et qu’elle fait un excellent travail.

Qui aurait pu prévoir que je sois accueilli par une Australienne à St-Jean-Pied de Port ?

J’entre dans l’auberge, c’est une vieille maison en pierre de plusieurs centaines d’années. L’aubergiste, un homme d’une cinquantaine d’années, est très chaleureux avec moi. Je lui donne mon credential. Il remarque que je suis Canadien :

— Est-ce que c’est vrai qu’il a fait –50 *C à Montréal cet hiver ?

— Oui ! c’a duré une semaine, ç’a été terrible, les autos ne démarraient plus.

Je sais que j’exagère, mais c’est plus fort que moi ! Je trouve que les Québécois ont toujours tendance à exagérer les rigueurs de l’hiver canadien. Peut – être avons-nous envie d’exprimer notre frustration à la place de nos ancêtres. Qu’auraient dit les colons à leur famille, s’ils avaient pu leur téléphoner ? Probablement quelque chose comme : ¨ il fait fret en criss, mais on est courageux, on va s'en sortir¨. Ils ont tant souffert du froid. C’est grâce à eux si nous pouvons vivre au Québec maintenant. C’est pourquoi, je ne manquerai jamais une occasion d’exagérer sur la température, pour que les Français sachent qu’on vient d’une bande de ¨tough¨

Lorsque j’entre dans la chambre du gîte, il y a des personnes de France, d’Allemagne, d’Australie ils ont entre 16 et 65 ans. Nous avons tous de la lumière dans les yeux.